SANS-PAPIERS/CRAINTE APRES LE LIMOGEAGE DE Y.BLANC

Le rapport Attali préconise de faciliter l'immigration pour faire face à la pénurie de main d'oeuvre patente dans certains secteurs. Nicolas Sarkozy a retenu cette proposition malgré les cris d'effraie des pusillanimes de sa majorité.


Oui, mais... dans le même temps son ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité etc... a fixé des quotas de reconduites aux frontières. Or sur les 3680 prévues seules 2800 ont été effectuées en 2007. Une goutte d'eau quand on sait que près de 400.000 personnes vivent sur notre sol sans papiers. Mais cette goutte d'eau a sans doute fait déborder le vase où s'exposent les fleurs offertes à la vue des votants. 


Tel un contremaître pas trop sûr de sa compétence, voulant ménager la chèvre et le chou, plaire aux uns et aux autres, aux actionnaires et aux ouvriers, pour se bien faire comprendre, démontrer son pouvoir, N. Sarkozy limoge celui qui osa le démentir un jour d'été 2006, comme par hasard à l'heure où les fameux bilans se consultent. Beau prétexte! 


Tout remonte à un article paru dans Le Monde de l'époque où Yannick Blanc disait tout haut ce que les autres taisaient, à savoir que les reconduites à la frontière ne se pratiquent pas à coup d'annonce. Le ministère de 2006 ne prévoyait que quelques centaines de régularisations alors qu'en réalité on savait qu'il y en aurait quelques milliers du simple fait de la législation européenne, des passe-droits réclamés et obtenus par les amis des amis qui ont un ami au gouvernement et dont la femme de ménage a besoin d'un papier, de la circulaire ministérielle du 13 juillet 2006 offrant aux préfets plus de souplesse afin de calmer l'ardeur et la colère des associations comme RESF. Le ministre de l'intérieur était N. Sarkozy qui répliqua, cinglant, "tous ceux qui parlent de chiffres aujourd'hui parlent de sujets qu'ils ne connaissent pas."


Je pense au contraire que M. Blanc était vraisemblablement le mieux placé pour en parler. Ce n'est qu'un avis, mais il me semble évident, tant on sait, pour reprendre l'exemple du contremaître, que l'ouvrier en sait plus que lui dans le domaine qu'il maîtrise. Rien qu'à Paris il y a 4000 régularisations par an. Mais N. Sarkozy l'ignorait sans doute. On n'avait pas dû l'informer.


L'ire Sarkozienne débuta ainsi: Yannick Blanc osait pointer du doigt les contradictions d'une politique d'immigration de façade électoraliste. Comme de plus c'était un ancien collaborateur de J.P. Chevénement, cet homme cumulait les handicaps.


Et il a la rancune tenace notre petit nouveau: c'est lui-même qui a signé le décret, présenté par le ministère de l'Intérieur, mettant fin aux fonctions de Yannick Blanc, directeur de la police générale de la Préfecture de police de Paris. Une première! Il n'est quand même pas allé jusqu'à lui annoncer de vives voix son limogeage, il l' a fait faire, par téléphone, encore une innovation, par un autre.


Ainsi, avec ce départ, toute la hiérarchie de la police est acquise au régime. Et les sans-papiers désormais craignent le pire car Y. Blanc savait agir aussi avec discernement comme il le précise dans Libération de vendredi: "« J’ai fait avec Resf mon métier, comme je l’ai toujours fait avec les interlocuteurs conflictuels de l’Administration. J’écoute les gens, je négocie ce qui est négociable. Dans les dossiers signalés par Resf, il y avait des situations familiales, voire humanitaires, vraiment dignes d’intérêt. Dans le cadre de ma fonction, j’ai toujours fait mon métier, avec ma personnalité, mais cela n’a pas été défavorable à l’institution au sein de laquelle je travaillais. »


Tout est donc pour le mieux. Tout est rentré dans l'ordre. Brice Hortefeux va pouvoir aligner ses prochains chiffres. Il aura un bon bilan, les félicitations du patron, une promotion peut-être, et quelques êtres humains seront jetés en pâture aux bonnes âmes qui applaudiront en chantant "volez charters!"



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