Histoires de radar.

C'est vrai que parfois,quand une lueur blanche éveille votre attention, on aurait envie de leur cogner un pain à ces foutus radars qui se recroquevillent de plus en plus au bord de nos routes, sans doute pour ne pas dénaturer le paysage, avec leur air de boîte de conserve avariée qui aurait contenu du corned-beef de la seconde guerre. C'est vrai qu'avec leurs gueules de faux-jetons tapis derrière un arbre, quand l'un d'entre eux vous alpague en pleine ligne droite parce que vous n'avez pas l'oeil rivé sur le compteur, mais sur la route, une humeur de kamikaze vous envahit incitant votre inconscient à faire demi-tour pour aller discuter d'homme à robot avec le sournois. J'ai jamais aimé les sournois, ceux qui vous regardent pas en face quand on leur cause, et surtout ceux de la nouvelle génération, ces fourbes, qui attendent que vous ayez le dos tourné pour jouer au photographe de la presse mondaine.
A ce sujet, je me permets une petite digression avant de poursuivre ma route. Gardez vos plaques jaunes à l'arrière, elles réfléchissent la lueur du flash rendant presque toujours illisibles les chiffres et les lettres, comme si c'était un miroir ou un autre flash près des numéros. Sont pas futés les technocrates! Vexés, ils cherchent la parade pour rattraper le chiffre d'affaires qui serait en baisse, paraît-il. A tel point que le bruit court que les plaques blanches sont désormais obligatoires aux deux bouts de l'auto. Faux! La législation n'a pas changé, blanche devant, jaune derrière.
Après cette courte pause bienfaisante, je reprends le volant, volant que je tenais un jour où j'emmenais ma petite tribu vers les cimes pyrénéennes. C'était... c'était... quelque temps après l'époque où la limitation fut fixée à 90 km/h sur les routes, y compris celles des Landes que je traversais ce jour de décembre en déclamant "Le Pin des Landes" de Gauthier au plaisir non partagé de mes proches, lorsque, "surgissant de l'herbe sèche et des flaques d'eau verte", je ne vis plus qu'un immense gaillard botté m'intimant, d'un geste impérial, d'obtempérer à son souhait de stopper ma 504. Je roulais à presque 110! Nous discutâmes courtoisement tout en lui présentant, moi mes papiers que j'avais cherchés fiévreusement parmi les bagages, lui les contemplant, admiratif sans doute de mon portrait vieux d'une quinzaine d'années, identique pourtant au modèle qu'il surplombait de toute son autorité. Il nous laissa repartir, sans page d'écriture, nous souhaitant bonne route et un pied plus léger. Le brave homme! Croyez-moi si vous le souhaitez, mais je roulai ensuite jusqu'à Barèges, respectueux des consignes, pour le remercier.
Plus efficace qu'un robot, non? Mais moins lucratif sans doute. Les quotas n'existaient pas encore et l'Etat n'avait pas un besoin si pressant d'entretenir pompeusement ses dirigeants.
Si je vous narre mes exploits de pilote de course -et encore je ne vous ai pas tout dit- de l'époque où je sais même pas si Schumarer, cet enfant de choeur, jouait avec les Dinky Toys, c'est que je viens de lire l'interview, sur LeMonde.fr, de celui qui a perdu sa main droite et trois doigts à celle de gauche en jouant au dynamiteur de radars.
Frédéric Rabiller, il s'appelle; une trentaine d'années, postier comme Besancenot, qu'il admire, mais lit Mein Kampf par éclectisme certainement, introverti et rêvant de révolution à la Baader. Alors forcément, après quelques amendes et stages de bonne conduite, las de ne plus pouvoir payer, Sarkozy n'étant pas coopératif en refusant l'amnistie, il décide de sauter le pas en faisant sauter les radars. Ce faux pas lui sera fatidique, en manipulant sa bombe il saute chez lui. Navrant!
Navrant, parce que je me demande si ça valait la perte d'une main et des doigts de l'autre de jouer à l'artificier quand on ne sait pas? D'autant qu'il aurait pu perdre pire, voire la vie. Navrant, parce que cette débauche déshumanisante de multiplier les robots partout -et la maréchaussée n'est pas seule concernée, la banque aussi, au hasard de la pensée- fait poindre une génération au tempérament colérique qu'une machine muette ne peut apaiser, exacerbant le contraire. Navrant, parce que la contrainte, à la virgule près, de ne faire aucune erreur est un non sens. Navrant, parce que chacun un jour ressent en lui cette humeur explosive, qu'il étouffe mais l'enchaîne à d'autres symptômes. Navrant, parce que cette civilisation de clones qu'on élabore, nous qui avions su inventer la diversité, nous rapproche de l'élevage en batterie. Navrant, parce que cet homme qui souffre sur son lit d'hôpital, ne fut en définitive que le jouet trop simpliste d'une société qui ne respecte plus l'homme.
Alors, ne soyons pas étonnés si certains, parfois, exaspérés de ne recevoir en écho que le silence d'un distributeur en tout genre -amendes, billets, boissons, essence, réservations etc...- en réponse à leur unique et personnelle déconvenue, sautent le pas.

Commentaires

Anonyme a dit…
Tout articulé tout fabriqué
Bien programmé pour vous aider
Je suis robot depuis plus de 2 000 ans
J'ai déplacé tous les océans
C'était urgent, je le savais
J'ai réinventé le cycle des saisons
Et vos déserts sont pleins de poissons

Je sais, mes circuits sont usés
J'ai beaucoup travaillé
Faudrait les remplacer
Me laissez pas tomber Oh ! oh ! oh !
J'ai toujours dominé mes envies
Je n'ai jamais trahi
Jamais désobéi
Vous me devez la vie
Vous me devez la vie

Avant la dernière guerre atomique
Si pathétique que j'ai pleuré
J'avais réuni le conseil des savants
Le danger, c'est votre politique
Vos présidents sont dépassés
Mais avant qu'un fou n'appuie sur le bouton
Quittez la terre il est encore temps

Et la terre vous l'avez quittée
Mais moi, je suis resté
Quand vous étiez là-haut
Et je vous ai sauvés Oh ! oh ! oh !
Si vous voulez m'assassiner
Après ce que j'ai fait
Moi qui vous ai aimé
Je peux tout faire sauter Oh ! oh ! oh !
Pas de problèmes pour me soigner
Vous m'avez fabriqué
J'ai appris à pleurer
Je vais apprendre à tuer Oh ! oh ! oh !
J'ai beaucoup travaillé
J'ai beaucoup travaillé.......

Ne me demandez pas pourquoi ces paroles. Ce sont celles qui me sont venues en vous lisant. Je n'ai que cette culture là, malheureusement. Le monde grogne, frémit, souffre, se soulève, au bord d'une implosion ?
http://fr.youtube.com/watch?v=pxCEi0qOVrw

Des bises, quelques peu automnales, comme ces tapis de feuilles mortes qu'on foule du pied et qui nous font avancer. Parfois comme dans un rêve.
J'ai rêvé, Patrick, j'ai trop rêvé..... Je ne rêverai plus........
Anonyme a dit…
Excellent ce petit poème. Excellent aussi le petit extrait du film. Vincent Lindon est parfait.
Mais si Mis. rêvez, continuez de rêver, c'est si bon.
Anonyme a dit…
Ce n'est pas un poème, Patrick, je n'ai pas votre culture.
C'est une chanson de Balavoine, Mort d'un robot...

A Samedi, où à Dimanche... de toute façon, à bientôt !!!!!