Ceci n'est pas un virus, mais ça y ressemble

 
Ceci n'est pas un virus - photo perso


     Ceci n’est pas un virus ! Il s’agit d’un Allium Mont Blanc, passé fleur, photographié par mes soins tant il me faisait songer à un virus.
     Virus qui n’en finit pas de faire causer, et notamment dans les multiples commentaires de ceux qui, ne les ramassant pas (la suite vous le dira), ramènent leur fraise, avec des propos quasi totalement débiles. 
     Figurez-vous que l’autre jour, sur le site de Sud-Ouest, je découvris un article relatant l’émergence d’un cluster (ce qui, entre nous soit dit, fait sans doute plus exotique ou scientifique que foyer viral) dans le département de la Dordogne où l’enterrement d’un individu du milieu portugais des ramasseurs de fraises de la région en aurait été à l’origine, selon le préfet du coin, qui s’insurgea de cette « …illustration de ce que l’on ne souhaite pas… », accusant de facto la famille d’avoir enfreint les règles édictées du confinement, à savoir un nombre restreint de participants, en sus du défunt et de ses croque-morts, en accueillant une fratrie disparate et conséquente. 
     Les commentaires, de tous les vengeurs masqués, aigris, bilieux, hypocondres et alarmistes, aussi prompts à réagir que le préfet, furent nombreux à la suite de l’article, chacun y allant de sa jérémiade sur ces étrangers qui viennent non seulement usurper le travail de tous ces bons Français, eux qui, pourtant, rechignent à le faire, mais de plus contaminer par leur désinvolture nos compatriotes confinés, ajoutant de judicieuses mais inapplicables solutions élaborées après boire, critiquant l’incapacité crasse de nos dirigeants ou suggérant le tissage d’un complot. 
     Il m’arrive rarement de réagir, sachant le peu d’intérêt qui s’ensuit. Je le fis pourtant. Hésitant à rappeler que nous vivions en Europe et que nos retraités vont tout autant polluer les régions portugaises que les courageux ramasseurs de fraises les françaises, instaurant ainsi un courant d’échange profitable à tous, je me bornais à dire que le préfet y était peut-être allé vite en besogne, rappelant qu’en toute chose corrélation ne valait pas causalité. 
     On me répondit. Comment ! s’offusquait-on, mais si le virus ne prend pas le train… l’importation se fait quand même… comportements égoïstes… QI déficients… frais sanitaires qui n’auraient pas dû être… 
     Bref, nous n’étions, les accusés et moi-même, qu’infâmes perturbateurs dont l’inconscience n’avait d’égale que la stupidité. 
Je me gardai bien de répondre à tous ces spécimens d’homo timoratus, si tétanisés par la peur qu’ils s’interrogent s’il ne vaut pas mieux rester confinés sous la couette plutôt que retourner travailler parmi tous les vérolés du corona. Le désopilant (si tant est qu’on puisse employer ce terme pour un enterrement, bien qu’on y rit souvent) est que je viens de lire, toujours dans Sud-Ouest, que le fils du défunt s’insurge du mauvais procès qu’on lui fait ainsi qu’à sa famille, les stigmatisant, car les règles édictées ont été scrupuleusement respectées lors de l’enterrement de son père. 
Sans doute les pompes funèbres, ou leurs ordonnateurs, pourront-elles en témoigner. 
     Aux tests effectués sur plus d’une centaine de personnes, les résultats ce soir affichent royalement neuf contaminations, la plupart asymptomatiques ou paucisymptomatiques, dont l’épouse du mort et le fils re-confinés illico. 
     Beaucoup de bruit pour rien, comme aurait dit Shakespeare, et comme à l’accoutumée en définitive. Si ma photo n'était pas celle d'un virus, le comportement de beaucoup le devient.

Commentaires