Paul Méfano, Royan 1966

 



     Royan, avril 1966. Capitale alors de l’art contemporain. L’œuvre de Paul Méfano, Interférences, dédiée à Olivier Messiaen, y fut créée. Paul Méfano, compositeur important de la musique contemporaine, vient de mourir en cette mi-septembre. J’assistai à la création d’Interférences. Parmi tant d’autres d’ailleurs, de Stockhausen à Gilbert Amy en passant par Messiaen. L’année suivante je découvris un jeune pianiste, Michel Beroff, qui remporta le 1er prix du concours international Olivier Messiaen qui avait lieu ici. 

     Le casino de l’architecte Ferret, inauguré en 1960, accueillait depuis 1963 le Festival International d’Art Contemporain. Avec quelques amis nous avions pris l’excellente habitude d’assister aux divers concerts, multiples expositions et conférences qui s’y déroulaient, partagés entre les salles du casino et la nef de la cathédrale dont l’architecture avant-gardiste en proue de navire souffre aujourd’hui de l’érosion du temps. 
     C’était une autre époque. Le festival avait été créé par Bernard Gachet, ophtalmologue et conseiller municipal sous la mandature de l’amiral Meyer puis sous celle de J-N de Lipkowski, amis et adversaires politiques de mon père ; orchestré de main de maître par Claude Samuel jusqu’en 1972, le festival devait fermer ses portes en 1977 faute de soutien du nouveau maire Tétard. Le projet de destruction du casino prévu par d’urbanistes iconoclastes se concrétisa en 1985. 
     À sa place de nos jours s’étale un square. Agréable certes pour tous les retraités qui promènent en laisse leur ennui digérant les rognons sauce madère du déjeuner, ou lieu de rendez-vous des lycéens se vautrant sur les pelouses, mais loin tout de même de l’univers artistique auquel, de toute manière, ces vieux déambulant et ces jeunes ignorants ne comprendront jamais rien. Ils préfèrent les staccatos des violon dits classiques joués sur l’inconsistance du sable. C’est très bien aussi, mais on ne bâtit pas sur du sable. 
     Ils font leur l’affirmation d’un contemporain sans succès de Monteverdi, Giovanni-Maria Artusi (1545-1613) dont il ne subsiste que deux ou trois notes que plus personne ne joue, augurant que : « Les nouvelles règles qui sont maintenant en vigueur et les nouveaux modes qui en découlent rendent la musique moderne désagréable à entendre. » 
Naquirent, après cette sottise magistrale qui d’ailleurs fit florès, seul succès de son auteur, quelques décennies et siècles plus tard Haydn, Bach, Mozart, Beethoven, Berlioz, Wagner, Mahler, Debussy, Ravel, Roussel, Schmitt, Messiaen et tant d’autres. 
     Ce n’est qu’une question d’éducation de l’oreille, et s’il est vrai que la musique contemporaine demande un peu plus de travail intellectuel, et encore, si on ne l’écoute jamais on ne pourra pas plus la comprendre que l’apprécier. Surtout si sont détruits les lieux où elle pouvait s’affirmer sans en offrir de nouveaux.
 
 

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