Peine de mort

 

   Il est tout de même confondant qu’en ce millénaire débutant une majorité de Français puisse à ce point se fourvoyer en réclamant un retour à la peine de mort. Rien n’a changé, en définitive, depuis la condamnation de Socrate. 
   Plus consternant encore, que des sondages sur ce sujet puissent voir le jour. Avec un résultat toujours aussi désespérant de 55 % d’individus, mâles et femelles confondus, partisans du tronçonnage corporel, cette peine dite capitale sans doute par euphémisme pudique tant elle est troublante pour l’esprit. 
   La peine de mort ne sera jamais rétablie en France, pas plus qu’en Europe. Qu’on se le dise et que les assoiffés d’une telle abomination mémorisent l’information que ce crime dont ils se font complices ne peut plus être. Qu’ils s’enfoncent dans le crâne cette certitude aussi définitive qu’une lame biseautée coupe une tête. 
   Car, qu’on ne s’y trompe pas, si des Fourniret ou autre Lelandais dérogent au principe du respect de la vie, soutenir la thèse qu’il est nécessaire, loi du talion oblige, d’agir avec la même cruauté que ces criminels, passés et malheureusement futurs, est totalement irrecevable. De quelque manière qu’on s’y prenne, à mains nues, à l’aide d’un objet contondant ou d’un couperet, par décision de justice, par vengeance ou par cruauté, tuer un être humain relève de la même inexcusable barbarie. Le justicier se fait assassin. 
   Mais, comme le faisait dire Molière à la Princesse d’Élide, « De grâce, Prince, brisons là ce discours », car je sais bien que rien ne saura persuader ces criminels proclamés qu’ils se trompent. 
   Un seul élément peut-être saurait les convaincre, celui d’exécuter la sentence, d’être le bourreau, de se tenir au pied de la guillotine, de voir ce qu’il en est vraiment. Et encore, je m’interroge à l’analyse consternante du résultat de l’expérience de Milgram où 90 % des participants torturaient sans trop d’état d’âme leur congénère. On sut toujours trouver les complices zélés pour exécuter les basses œuvres. 
   Peut-être alors lire le texte que Robert Badinter remit le 7 décembre 2016 à l’ENM devant les futurs magistrats, neuf pages manuscrites rédigées, pour se libérer, par Monique Mabelly, doyenne des juges d’instruction de Marseille, commise d’office pour assister à la dernière exécution qui eut lieu en France le 9 septembre 1977 dans la cour de la prison des Baumettes, où la guillotine, avant d’être définitivement remisée, sectionna le cou de Hamida Djandoubi. Le bourreau s’appelait Marcel Chevalier. 
   Quelques années plus tard Robert Badinter obtenait l’abolition de la peine de mort pour une justice digne de ce nom. Ci-dessous la première page du témoignage tragique de Monique Mabelly. 
   Pour lire l’ensemble en version imprimée, il suffit de cliquer sur le lien ci-dessous.
 

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