Union de la carpe et du lapin

 

Nature morte aux roses
Nature morte aux roses

    Lors de l’université d’été qui s’est déroulée à Blois, les écologistes ont déclaré leur amour des socialistes qui sont tombés sous le charme. 
   Ils roucoulent comme des colombes avant l’accouplement. Nous avions connu l’union de la gauche fin des années soixante-dix. Connaissant la fin de l’idylle il n’est pas présomptueux de prévoir la fin de celle qui se noue actuellement entre le PS et EELV, sorte de mariage de la carpe et du lapin. Et que dire de l’éventuel concubinage un moment souhaité avec communistes et insoumis ? Ces deux derniers ayant fait heureusement savoir leur désaccord. 
   Le socialisme est un parti de liberté. Les trois autres totalitaires et oppressifs. Antinomiques, jamais ils ne s’entendront. Trop de différences les opposent. D’ailleurs, au sein même des verts, la contestation est constante et si elle est autant virulente que celle des quelques récalcitrants spongieux que l’on put observer à l’origine de l’effondrement du parti rose, elle concerne tous les membres du mouvement écologique, chacun ayant sa solution qu’il voudrait voir adopter pour chacune des propositions émises. Comment voulez-vous qu’ils dialoguent demain ? À moins d’instituer un forum perpétuel ouvert à tous les mécontentements où l’on passera son temps à pinailler plutôt qu’à progresser. 
   Au-delà de ces reproches tout fonctionnels, il en est d’autres rédhibitoires à l’association. Les principes fondamentaux. Comme le revendique le mouvement, les valeurs du PS sont au service du progrès humain dans toutes ses dimensions. Cela signifie une conception évolutive fondée sur la science, la connaissance et le respect de tous. 
   Les écologistes ne respectent que leur point de vue, bien que les moyens d’y parvenir soient cacophoniques. Hors leur vision du monde, il n’est point de salut. Il serait fastidieux de décliner les revendications abusives et irréalistes d’un parti qui se targuerait de gouverner. L’abandon du nucléaire, civil et militaire, en est le triste exemple, tout comme la sortie de l’OTAN ou le désarmement. Le pacifisme n’est pas une vision pertinente dans un monde de violence. 
   Je passerai sous silence l’aberration d’une politique agricole passéiste, l’agro-écologie, où la priorité est donnée aux infrastructures réduites, agro-écologie contraire au besoin mondial, s’apparentant plus au jardinage amateur, que pratiquent avec raison et bonheur ruraux, banlieusards ou retraités, jardinage suffisant pour une ou deux familles mais totalement inadapté pour nourrir une population sans cesse grandissante. Seule l’agriculture à grande échelle en est capable, avec la nécessité d’augmenter les superficies cultivées par la réduction du nombre d’exploitations, ainsi qu’utiliser, tout comme d’ailleurs pour les jardiniers dans leur potager, engrais et pesticides pour, non pas tant le rendement, mais la simple éclosion d’une plante et non son étiolement programmée si l’on ne fait rien (par exemple cerisiers et betteraves, qui grâce aux interdictions imposées d’intrants risquent de disparaître, ou encore le vin bio parfaitement imbuvable). La concurrence mondiale est telle, et dans tous les domaines, qu’il nous faudra bien s’adapter si nous voulons survivre et ne pas dépendre entièrement d’une production externe. 
   Quant aux autres points de friction qui ne manqueront pas de germer dans l’hypothèse d’une alliance et qu’aucun compromis ne parviendra à lisser, tels la République, l’économie, la santé, l’Europe, et d’autres sujets dont les approches diffèrent tant, qu’il est improbable que l’on puisse faire cause commune, à l’instar de l’esperanto, marotte écolo ou marronnier journalistique, au programme scolaire. 
   D’une manière générale, à lire les sujets de préoccupation de ce parti, si quelques unes tombent sous le sens – ne contestant en rien leur utilité –, les contraintes envisagées pour parvenir à leur réalisation ainsi que l’application de la plupart des autres sont, non seulement trop nombreuses, mais de plus autoritaires, partant inacceptables. 
   Un trop-plein d’obligations entraîne le rejet de ce nouveau Léviathan. 
  Trop de divergences dans un couple ne laissent entrevoir qu’un divorce. 
   Que les socialistes, totalement déboussolés après la raclée vécue lors des dernières élections présidentielles et les résultats en demi-teinte des municipales, recherchent des solutions hémostatiques à cette hémorragie, il n’y a là rien que de très normal, mais qu’ils s’acoquinent avec des illuminés, euphoriques après quelques éphémères succès aux dernières municipales – qui ignorent que diriger une collectivité urbaine est à cent lieues des impératifs nationaux – relève du suicide collectif comparable à ceux organisés par des sectes ésotériques. 
    Il y a sans doute mieux à faire, ne serait-ce déjà que proposer autre chose que la contradiction systématique aux décisions gouvernementales actuelles et tenir un discours responsable, non le charabia totalement inaudible émis ces derniers mois de la voix fluette et atonale du premier secrétaire.

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