France façon puzzle

   Alors que le prestige de la France part à vau l'eau, il ne fallait pas être grand clerc pour prédire que les propos tenus par E. Macron devant les Corses allaient susciter des vocations chez diverses peuplades. Les Bretons réclament maintenant cette sorte d’autonomie et les Occitans y songent – sans trop savoir de quoi cette autonomie sera faite, sinon qu’il s’agirait d’inscrire dans la Constitution une région en communauté historique, culturelle et linguistique. Naturellement, mécaniquement ensuite, la dissidence pure et simple. Aussi absurde qu’en Catalogne.

   Pourquoi pas l’Île d’Aix également, en condominium avec vous et ses voisines, Oléron et Ré ? Napoléon y séjourna avant son départ pour Sainte-Hélène, exilé. Il y a même un hôtel qui porte le nom de l’Empereur. Mais le patois n’est pas le même qu’en Corse, dialecte toscan, le même que celui de l’Empereur. Difficile de faire un rapprochement. Pourtant ces îles ont leur culture, leur histoire, leur jargon ainsi que la Corse, la Bretagne ou d’autres, tous les autres. Les divers parlers régionaux d’ailleurs tendant à ressurgir. La France façon puzzle, bientôt, ou plutôt cacophonique à écouter leurs desiderata. Pourtant nul ne cherche, comme aux siècles précédents, à interdire quiconque de baragouiner dans son idiome, et avec l’accent. La seule chose exigée est un langage commun afin de se comprendre, sans avoir à remplir des formulaires bilingues. Pourquoi dès lors désirer un enseignement tout en patois local ? Alors que, tôt ou tard, camarades, en Europe où nous sommes, c’est une langue commune qui s’imposera. Par la force des choses. Naturellement. Tout comme évolua le français du XIIe siècle vers ce que nous connaissons aujourd’hui (lisez les lais de Marie de France, dont la langue n’a déjà plus rien à voir avec la romane de l’an 842, qui deviendra le français, du Serment de Strasbourg).

   Demain nos arrières, et plus, petits-enfants ne parleront plus comme nous. Et je serais bien épaté si le Breton, le Basque, l’Occitan, le Corse ou un autre surnage un jour dans ce brassage évolutif, avec ou sans article d’une Constitution. Comme s’évanouiront l’Allemand, l’Espagnol ou l’Italien se mêlant à l’Anglais et au Français, aux langues slaves et nordiques. Les livres seront là pour s’en souvenir, et ce sera bien suffisant pour les apprendre à qui voudra, comme le latin ou le grec ancien.

   Bataille d’arrière-garde s’il en est, l'escarmouche des nationalistes de tout poil n'est que regard tourné vers le passé. Ils ignorent l’avenir. Ils sont comme les vieux des repas de fin d’année. Tous à geindre de leurs maux en racontant leur vie d’avant, n’espérant qu’une chose, revivre leur jeunesse. Pas un pour se projeter vers demain. Pas un seul octogénaire pour planter, avec La Fontaine, l’arbre de sa fable. Triste à mourir !

   Conservez vos traditions, personne ne vous en empêche, mais cette culture qui nous est commune et a fait notre histoire, une dans le rassemblement des diversités enrichissant chaque jour notre patrimoine européen, avant que n’émerge de ce magma une nouvelle spécificité, ne vous isole pas dans vos îles réelles ou virtuelles. Bien au contraire, elle vous permet de survivre.

 


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